Ouverture des tribunaux de l’Ontario 2017

Allocution du juge en chef George Strathy à l’occasion de l’ouverture des tribunaux de l’Ontario, le 12 septembre 2017

Sous réserve de modifications

Chers invités, je suis heureux de vous souhaiter la bienvenue à notre célébration de l’ouverture des tribunaux pour 2017.

Je dis « célébration » en toute connaissance de cause. Bien que nous nous trouvions dans un endroit solennel — la plus grande salle d’audience de la province, qui a connu plus que sa part de tragédies humaines — nous sommes réunis pour une occasion joyeuse. Après la cérémonie d’ouverture des tribunaux de l’année passée, j’ai demandé à ma femme ce qu’elle avait pensé de la cérémonie. Elle m’a répondu : « Tout le monde avait peur d’applaudir. Tu avais l’air trop grincheux. » Je vous assure, je ne suis pas grincheux. Nous sommes là pour célébrer quelque chose de joyeux et j’espère que tout le monde se sentira libre d’applaudir quand l’envie lui en prendra.

La tradition ontarienne de célébrer l’ouverture des tribunaux remonte à 1946, lorsque le juge en chef de la Cour supérieure, James McRuer, empruntant la pratique des tribunaux anglais, a souhaité organiser une cérémonie pour marquer le début de l’année judiciaire. Le juge en chef McRuer était le seul orateur cette année-là. Selon le Toronto Daily Star, le juge en chef a blâmé l’alcool, le divorce et les romans policiers pour l’augmentation des activités criminelles. Heureusement, peut-être, d’autres orateurs ont été invités à prononcer quelques mots les années suivantes. Dans les années 1950, le trésorier du Barreau, le ministre fédéral de la Justice et le procureur général de l’Ontario ont été ajoutés à la liste des orateurs. Enfin, des représentants d’organisations d’avocats et d’autres acteurs du secteur de la justice ont été invités à prononcer un discours. La présence de ces participants nous rappelle que malgré nos rôles distincts et parfois accusatoires, nous partageons tous la même préoccupation pour la santé de notre système de justice.

Je remarque constamment tous les aspects de notre système de justice qui méritent d’être célébrés. J’ai eu énormément de plaisir à travailler avec un grand nombre d’entre vous. En regardant autour de moi, je vois des gens qui soit individuellement soit dans le cadre de leur organisation offrent à la population ontarienne un accès réel à la justice.

Par exemple, depuis 2010, la Fondation du droit de l’Ontario a distribué plus de 20 millions de dollars dans le cadre de plus de 185 subventions, par le biais de son Fonds d’accès à la justice. Ces subventions ont permis de fournir des services d’assistance juridique et de défense à des particuliers et à des communautés qui restent en marge du système de justice. Des centaines de projets ont été financés, y compris des cliniques juridiques étudiantes pour des parties à des affaires de droit de la famille, des services d’assistance juridique pour des femmes autochtones aux prises avec le système de justice pénale et des soutiens pour des femmes victimes de violence conjugale.

Il y a lieu de relever également le travail de Pro Bono Ontario, qui incarne avec succès la tradition des avocats de fournir des services juridiques gratuits aux clients nécessiteux. L’organisme dessert ainsi plus de 20 000 clients chaque année. Non seulement il leur donne accès à la justice, mais par ses services il permet également au système de justice d’économiser des millions de dollars chaque année en aidant des plaideurs à régler leurs différends efficacement, ce qui atténue les pressions qui pèsent sur les ressources judiciaires. Comme je l’ai déjà affirmé, les fonds dépensés par le biais de Pro Bono Ontario et de Pro Bono Canada sont plus utiles pour l’accès à la justice, « dollar pour dollar » que tout autre programme qui existe.

Autre réalisation impressionnante : tout ce qui peut être accompli lorsque des groupes conjuguent leurs efforts. L’année passée, l’Advocates’ Society, l’Indigenous Bar Association et le Barreau du Haut-Canada ont travaillé sur l’élaboration d’un ouvrage intitulé, en anglais, « Guide for Lawyers Working with Indigenous Peoples and Issues ». J’ai passé en revue une de ses premières ébauches et j’ai été très impressionné. Lorsqu’il sera publié, ce guide constituera une ressource pratique et judicieuse pour le secteur juridique, y compris les magistrats et les avocats.

Malgré les innombrables efforts déployés pour améliorer l’accès à la justice, il ne faut pas perdre de vue les problèmes de nature systémique. L’arrêt de la Cour suprême du Canada dans l’affaire R c. Jordan, en 2016, a critiqué la culture des délais et a attiré notre attention sur l’importance d’avoir des procédures pénales expéditives. Ces préoccupations ont été prises très au sérieux par mes collègues dans les tribunaux de première instance, qui parleront sans aucun doute de ces questions.

Il est toutefois important de veiller à ce que les affaires de droit civil et de droit de la famille ne soient pas éclipsées par le besoin pressant de rendement dans le système de justice pénale. En particulier, je note que les deux paliers de gouvernement, les deux cours de première instance et des avocats éminents en droit de la famille ont exprimé leur désir de poursuivre l’expansion de la Cour unifiée de la famille en Ontario. C’est très simple : nous ne pouvons pas perdre cette occasion d’aller de l’avant avec cette réforme si attendue.

Nous devons examiner de près l’efficacité du système de justice civile par rapport à l’objectif de fournir un accès prompt et efficient à la justice. Le détournement des ressources judiciaires, à la lumière de l’arrêt Jordan, a eu comme conséquence malheureuse d’intensifier les pressions sur les dossiers civils. Nous devons renouveler nos efforts d’améliorer l’accès à la justice civile.

Parlons maintenant de la Cour d’appel de l’Ontario. Le travail de la Cour d’appel non seulement forge la vie de la population de l’Ontario, mais est également souvent cité par d’autres cours d’appel du Canada et de l’étranger. La qualité et le volume des jugements de cette Cour demeurent inégalés dans les provinces appliquant la common law.

Au cours des six prochains mois, quatre de nos collègues les plus anciens, les juges Karen Weiler, Robert Blair, Eleanor Cronk et John Laskin, prendront leur retraite. Ces juges, collectivement, représentent plus de 100 ans d’expérience à la magistrature et près de 80 ans à la Cour d’appel. Ces quatre juristes ont contribué à forger l’orientation de la Cour et de sa jurisprudence pendant un quart de siècle et à définir la fonction de juge de la Cour d’appel de l’Ontario. Leur legs continuera à nous inspirer pendant des décennies. Ils ont tous été des collègues exceptionnels et ils laisseront un grand vide.

J’ai le plaisir d’annoncer que depuis la cérémonie d’ouverture des tribunaux de septembre dernier, l’effectif de notre Cour s’est enrichi grâce à la nomination de trois nouveaux juges, dignes du flambeau transmis par nos juges qui prendront leur retraite. Les juges Gary Trotter et Michal Fairburn viennent de la Cour supérieure et le juge David Paciocco de la Cour de justice de l’Ontario. Nous sommes ravis d’accueillir nos nouveaux collègues et je tiens à exprimer mes remerciements à la ministre de la Justice pour ces nominations judicieuses et opportunes.

Deux de nos collègues de la Cour ont assumé des responsabilités spéciales à la demande du gouvernement de l’Ontario. L’année passée, j’ai indiqué que le juge Michael Tulloch avait été nommé pour examiner la surveillance de la police dans la province et faire rapport sur ses conclusions. En avril, le juge Tulloch a remis son rapport et ses recommandations, qui ont été accueillies avec beaucoup de respect, car elles étaient détaillées, équitables et équilibrées. Le gouvernement a ensuite confié au juge Tulloch le soin de mener un deuxième examen, axé sur les contrôles policiers de routine, qui a déjà commencé.

Récemment, la juge Eileen Gillese a été nommée à la direction d’une Commission d’enquête de deux ans sur les infractions commises par une infirmière reconnue coupable du meurtre de huit personnes âgées sous ses soins.

Les juges Tulloch et Gillese nous manqueront dans nos activités quotidiennes. Cependant, ils ont assumé des responsabilités importantes qui se rapportent à des questions primordiales pour la sécurité et la gouvernance de tous les Ontariens et Ontariennes. Le fait que nos collègues aient été choisis pour des fonctions publiques aussi importantes est un signe de la confiance que le public nourrit à l’égard de la Cour et de ses membres.

Je m’en voudrais de ne pas souligner deux changements importants parmi le personnel de notre Cour. Ceux d’entre vous qui travaillent avec notre Cour ou qui représentent des clients devant notre Cour savent que nous sommes très fiers de notre remarquable personnel, et à juste titre. Alison Warner, notre avocate principale et directrice des services juridiques de notre Cour, a récemment quitté son poste pour accepter un détachement au Bureau du juge en chef de la Cour de justice de l’Ontario. Nous sommes profondément reconnaissants à Alison pour ses deux décennies de services, d’abord en qualité d’avocate interne et plus récemment en qualité d’avocate principale. La Cour a grandement bénéficié du brillant esprit juridique d’Alison, de son dévouement et de son leadership. Vous allez nous manquer, Alison.

J’ai le plaisir d’annoncer que la successeure d’Alison a été récemment embauchée et que Falguni Debnath, avocate plaidante chevronnée du ministère fédéral de la Justice possédant une riche expérience dans les domaines juridique et de la gestion, se joindra à notre équipe comme avocate principale, à la mi-octobre. Falguni, bienvenue à la Cour d’appel.

Par le passé j’ai mentionné le besoin d’une modernisation technologique. La Cour d’appel et son personnel collaborent avec le ministère du Procureur général et des consultants externes à l’évaluation de nos besoins technologiques, actuels et futurs, afin de nous aider à mieux servir le public et les juristes. J’aimerais remercier le procureur général et son personnel de leur appui pour ce projet. À cet égard, je suis ravi de souhaiter la bienvenue au sous-procureur général (intérimaire) Irwin Glasberg, qui a succédé, au début de l’année, à l’ancien sous-procureur général Patrick Monahan, qui continue de servir le public à titre de juge de la Cour supérieure de justice. Merci, Monsieur le Sous-procureur général Glasberg et Monsieur le Juge Monahan, dans vos anciennes fonctions, du soutien que vous nous avez témoigné.

Pour terminer, en observant la salle et ceux qui s’y trouvent — les juges, les avocats, les parajuristes, les administrateurs des tribunaux, les législateurs et les représentants du secteur de l’application de la loi — je suis frappé par le fait que nous partageons tous le même objectif de hisser notre système de justice au rang du meilleur du monde. Nous le démontrons chaque jour. Nous reconnaissons tous que des améliorations sont possibles, mais ne perdons pas de vue nos accomplissements. Nous avons en effet beaucoup à célébrer.

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